Terraferma.

Lampedusa, c’est loin et si petit à l’échelle l’Europe et c’est presque en Afrique tellement c’est au sud.
Un navire sombre tout près de là quelque part en Méditerranée et des centaines de passagers s’y noient, cela fait ici si peu de bruit. Nous n’imaginons pas les souffrances endurées et la fin atroce de ces existences. Ils étaient des migrants venus d’Afrique ou d’Asie qui ne supportaient plus la misère et la guerre dans lesquelles ils étaient contraints de vivre. Ils sont partis, ils ont essayé de fuir vers une vie qu’ils imaginaient meilleure, vers cette Europe dont, sûrement, ils rêvaient. Leur rêve s’est terminé et a fait place au vide dans l’indifférence des puissants, si ceux ne sont les mots justes du Pape qui parle de « honte » et de « la mondialisation de l’indifférence ».
Terraferma est le titre d’un film italien d’Emanuelle Crialese tourné en 2011 et construit à partir d’un événement réel similaire où Timnit T, femme immigrée originaire de la corne de l’Afrique et actrice principale du film, a été une des seul survivants sur un groupe de 90 migrants qui essayaient eux aussi de rejoindre l’Europe, après avoir passé vingt-trois jours en mer sans manger ni boire. Ils ont vu des bateaux croiser leur embarcation sans qu’aucun ne fasse un geste pour leur venir en aide.
Aujourd’hui c’est la même histoire, aussi tragique, qui s’est répétée.
Ce film est intéressant parce qu’il montre bien la complexité des sentiments, les hésitations, les méfiances, les contradictions ressentis par les habitants de l’île de Lampedusa, confrontés à l’arrivée des migrants venus d’Afrique. C’est, en réduction, toutes les contradictions et tensions qui se développent en Europe où l’extrême droite voit ses idées progresser avec, entre autres, les Roms.
La peur conduit à la colère, la colère à la haine, et la haine conduit au côté obscur de la force.