Une journée spéciale !

Le 10 mai est une journée spéciale que personne ne peut oublier.

C’est d’abord la journée de Commémoration de l’abolition de l’esclavage aboli en 1791 par ce simple et lumineux décret de l’Assemblée Nationale :

« Tout individu eſt libre auſſitôt qu’il eſt entré en France. »

puis rétabli par Napoléon, honte à lui, en 1802 avant d’être enfin définitivement aboli en 1848 par Victor Schoelcher.

Jean-Baptiste Carpeaux, 1868

Le 10 mai 1871, c’était le temps des cerises !

…. mais déjà  » à travers le babil des moineaux joyeux, on distingue le crépitement des mitrailleuses « , et la Commune de Paris commençait son agonie qui allait se terminer 18 jours plus tard dans le bain de sang des Communards

Et puis, il y a eu le 10 mai 1981 et l’élection de François Mitterrand. Enfin les partis de gauche accédaient au pouvoir après plus de 20 années d’hégémonie sans partage de la droite.

Et comment oublier ce moment suspendu où c’est finalement l’effigie de Miterrand qui est apparue dans les « étranges lucarnes » .

Oh ! bien sûr nous connaissons la suite avec son arsenal de renoncements et de déceptions (les déçus du socialisme…). C’était déjà le résultat inéluctable du « en même temps » qui finit toujours par pencher du côté des puissances de l’argent.

Mais quand même cette victoire c’était celle de mai 1968, des luttes émancipatrices et des mouvements sociaux. Et c’est Mitterrand qui a instauré la retraite à 60 ans, l’abolition de la peine de mort et d’autres grands progrès sociétaux dans la lignée du CNR de 1945.

A l’heure où tous ces acquis sont battus en brèches au nom d’un soit disant réalisme économique qui n’est qu’un écran de fumée pour tenter d’occulter la frénésie de profits des grands groupes industriels et de leurs actionnaires, dont Mr Macron est le représentant zélé, il est bon de se remémorer de tels moments passés et de souhaiter que d’autres moments dignes de celui-là reviennent bientôt.

Et pour conclure, voici une longue réflexion de François Ruffin sur les temps présents qui mérite le détour:

Le gentil Ruffin contre le méchant Mélenchon?

« On ne sort, paraît-il, d’après le cardinal de Retz, de l’ambiguïté qu’à son propre détriment. »

Je ne suis pas sûr.

Un peu de clarté ne nuit pas toujours.
Depuis que je m’assagis, depuis que L’Obs et Libé font leur Une sur ma pomme, j’ai pas mal de nouveaux amis. De la « deuxième gauche », on dira. Des anciens sympathisants socialistes, voire des ex-ministres, tant mieux, je prends. J’entends monter la petite musique du « gentil Ruffin » contre le « méchant Mélenchon », chez des éditorialistes qui n’étaient pas acquis. Ces sympathies, il ne s’agit pas de les rejeter : avoir plein de copains, c’est bien. Mais je ne veux pas les décevoir, qu’ils se trompent de canasson : car si j’ai changé, c’est vrai, dans mon expression, je varie peu dans mes convictions. Il s’agit, surtout, de ne pas tromper les Français sur le chemin, la ligne de crête, que je m’efforce de tracer, pour la gauche, pour notre pays.

***

J’ai lancé mon journal Fakir, il y a 23 ans, en 1999, sous la « gauche plurielle », donc. Ma région avait déjà subi la fuite du textile, des milliers d’emplois détruits, les licenciements en série. C’était l’ambiance de mon enfance, la toile de fond du Courrier picard sous la « Génération Mitterrand ». Mais voilà que, en cette fin des années 90, voilà que suivait une deuxième lame : Magnetti-Marelli, Honeywell, Yoplait, Lee Cooper, Whirlpool…

Quelle était la réponse du gouvernement Jospin – pour qui, bien sûr, j’avais voté ? Aucune, pas plus que durant la décennie d’avant. Ce furent « l’Etat ne peut pas tout », les élargissements européens à l’est validés, le mot « ouvrier » même plus prononcé, l’industrie qui appartient au passé, avec de la compassion pour les damnés de la mondialisation : des « plans de reclassement », des « promesses de formation », des « cellules de revitalisation »… Ce choix politique d’alors relevait de l’abandon : la gauche lâchait, sapait sa propre base sociale. Qui s’effritait.

Chez moi, à Amiens, le quartier Nord, adossé à la Zone industrielle, né pour en héberger les travailleurs, se délitait. Les immigrés et leurs enfants, bien souvent, étaient les premiers frappés, écartés d’un « marché du travail » qui se resserrait. J’accompagnais des hommes dans la tournée des boîtes d’intérim, à la recherche d’une mission de caristes. Et je voyais les femmes se tourner vers les « emplois de services » : aides à domicile, assistantes maternelles, femmes de ménage…

Je me souviens d’un tract, sur Whirlpool, que je distribuais à Amiens lors d’une « réderie », les vide-greniers de chez nous : « T’inquiète pas mon gars, m’avait répondu un mec popu, Jean-Marie va nous régler tout ça ! » Le 21 avril 2002 ne m’a pas surpris. Depuis ma Picardie, je l’avais un peu senti.

A-t-il au moins servi d’électrochoc ? Non, aucunement. Dans l’entre-deux tours, des manifs allaient clamant « F comme fasciste, N comme nazi », et je participais sans ardeur à ce rite expiatoire. Mais la gauche, c’est-à-dire à l’époque son cœur – le Parti socialiste -, revisitait-elle ses erreurs ? Révisait-elle son cap ? Non. Il fallait, au contraire, se montrer toujours plus « moderne », nier les délocalisations, ou les minimiser, oublier les travailleurs, n’évoquer au mieux que les « pauvres », les « exclus », reprendre les refrains de la droite, flexibilité compétitivité, les aménager d’une pincée de social, voire d’« Europe sociale », se débarrasser des « archaïsmes du marxisme ». Contre cette pente, je publiais un réquisitoire « La Guerre des classes ».

Le Traité constitutionnel européen fut, pour moi, en 2005, une grande campagne, un moment de vérité. Enfin, une vraie question était posée aux Français : pour ou contre « la libre circulation des capitaux et des marchandises, y compris avec les pays tiers » ? Pour ou contre « la concurrence libre et non faussée » ? Malgré l’unanimité, ou quasi, des grands médias, des grands patrons, des grands partis, la question fut tranchée avec netteté : 55 % de non, bien davantage dans un coin comme le mien. Et près de 80 % des ouvriers opposés. Malgré ce vote clair, un an plus tard, au Congrès de Versailles, la majorité des parlementaires socialistes validaient le traité de Lisbonne. Rien ne les ferait dévier.

L’expérience Hollande ne fit qu’enfoncer le clou. La signature du pacte Sarkozy-Merkel à peine passé l’été, le Crédit impôt compétitivité emploi, un cadeau à vingt milliards d’euros sans condition, l’accord national interprofessionnel pour « plus de souplesse » dans l’emploi, le retour du travail le dimanche, la Grèce abandonnée face à Berlin et au FMI, Florange trahi, et chez moi les Goodyear aussi… Durant la « Loi travail », au cours de Nuit debout, je prêtais serment : « Nous ne voterons plus PS. »

Que ce Parti socialiste ait porté, dans ses bagages, puis sur les fonts baptismaux, Emmanuel Macron, c’était logique. C’était dans sa logique de décomposition.

Je ne suis pas là pour refaire le procès : l’histoire a jugé, les urnes aussi. Je veux bien, même, avec clémence, avec plus d’indulgence que dans mes jeunes années, concéder des avancées, pas seulement sociétales (la peine de mort abolie, le Pacs instauré, puis le mariage gay) mais aussi sociales (RMI, CMU, emplois-jeunes, 35h à la rigueur). Mais pour l’essentiel, c’est le long cheminement du renoncement.

Et à côté, dans la foulée du 29 mai, une autre gauche est re-née. Jusqu’alors, je votais, pour les cocos ou pour les écolos, pour Besancenot ou pour Bové, j’ai un peu tout fait, mais pour des candidatures rarement remboursées, et qui ne pèseraient guère sur notre destin commun. Ma frustration, mes convictions ont trouvé un débouché : Jean-Luc Mélenchon, que je ne connaissais pas. Je l’ai rencontré au Sénat, comme reporter, quelques jours avant qu’il ne quitte le PS. Nous avons déjeuné ensemble, et au milieu du brouhaha d’une brasserie, je lui ai recommandé L’Illusion économique, d’Emmanuel Todd (sur la nécessité, politique aussi, d’un protectionnisme) et Comment les riches détruisent la planète, d’Hervé Kempf (sur le lien, profond, entre social et écologie). J’ai assisté à la conférence de presse où il a lancé le Parti de Gauche, et j’ai appris. C’était la première fois, en entendant un homme politique, que j’avais le sentiment d’apprendre. Puis, comme compagnon de route, jamais encarté, avec toujours ma liberté, j’ai accompagné le Front de gauche, participant à toutes les universités d’été, offrant des arguments, sur le partage de la valeur ajoutée, sur le retour de l’industrie, mes intuitions sur un monde du travail blessé, délaissé. J’ai suivi ses trois campagnes, 2012, 2017, 2022, où avec son immense talent, « L’Insoumis » a sorti la gauche de l’ornière, a rendu nos idées majoritaires – sinon dans le pays, ça reste à faire, du moins dans notre camp.

Voilà le parcours qui m’a formé, forgé, longtemps solitaire, puis qui s’est trouvé des frères. Voilà ma filiation, qui part de la Grande Révolution de 1789, qui passe par Lamartine et la tragédie de 48, par Vallès et la Commune, par Jaurès bien sûr et la naissance du socialisme, par Blum et le Front populaire, le Conseil national de la Résistance, Mai 68, Mai 1981 que je fais mien, jusqu’à la coupure de 1983, « nous ouvrons une parenthèse » comme l’énonce alors Lionel Jospin, et le fil qui se renoue avec Jean-Luc : lui avec d’autres, mais plus haut que d’autres, a porté le flambeau qu’il nous passe aujourd’hui, « Faites mieux », jusqu’à réunir toute la famille, toutes les familles, communistes, écologistes, socialistes, derrière une même bannière.

***

Pourquoi revenir sur ce passé ? Parce que nous en héritons, parce qu’il n’y a pas de table rase. Parce que je préfère avancer avec clarté, sans ambiguïté. Parce que, aux hommes et aux femmes de bonne volonté qui, ces temps-ci, me trouvent quelques charmes, je veux le dire : il ne s’agit pas seulement, aujourd’hui, de rompre avec Emmanuel Macron, ce serait facile tant il est détesté. Pas même, uniquement, avec le mandat Hollande, déjà aux oubliettes. Mais notre devoir, c’est bel et bien de « fermer la parenthèse » ouverte il y a quarante années, d’en finir avec des dogmes usés.

C’est une nécessité.
C’est une nécessité pour reconquérir une confiance populaire.
C’est une nécessité pour remettre sur pied notre pays.
C’est une nécessité pour la planète.
Car que produit la concurrence partout, la concurrence sur l’énergie, les transports, l’agriculture, la concurrence entre les travailleurs, les territoires, les agricultures, la concurrence jusqu’à la lie et la folie ? Il en ressort le chaos, le désordre, un hôpital en lambeaux, des prix de l’électricité qui font du yoyo, le rail qui déraille, une école pilier de la République qui recrute ses enseignants en job-dating, bref, tout qui devient instable. Qu’apporte le libre-échange étendu à tous les continents ? La recherche du moindre coût, social, fiscal, environnemental. Qu’engendre la compétitivité comme boussole ? Les biens communs écrasés par les égoïsmes. Chaque jour, cette doctrine, qui a dominé notre époque, qui a régné de Chicago à Bruxelles, cette doctrine ne se montre pas seulement impuissante à résoudre les crises, à commencer par la plus terrible des crises, la crise climatique, pire : chaque jour, cette doctrine creuse notre tombe.
Contre ce fanatisme du marché, les esprits ordinaires se sont révoltés, depuis un bail déjà. Non par « idéologie », mais parce qu’ils en sont affectés, très concrètement, côté emploi, dans leurs salaires et leurs horaires, dans leurs contrats précaires, mais dans leur vie quotidienne aussi, de la naissance (avec la maternité de la sous-préfecture qui a fermé) jusqu’à la vieillesse (comment payer l’Ehpad à la mamie qui souffre d’Alzheimer ?) en passant par mille anomalies (les services publics tout en numérique, le courrier postal qui devient « e-lettre rouge »). Le sens commun renâcle devant ces innovations, perçues comme des dégradations, des aberrations et pour le dire comme Gramsci, « nous vivons un temps de détachement de l’idéologie dominante ».

Des réponses se font jour, sans rien de révolutionnaires, plutôt de décence et de bon sens : c’est un libre-échange que l’on tempère, que l’on modère, sans autarcie aucune, mais avec des barrières douanières, des taxes aux frontières, selon les industries que l’on veut protéger ou faire renaître ici. C’est un travail que l’on ne flexibilise plus, mais à qui on offre statuts et de revenus, des droits associés, garanties de dignité. Ce sont des secteurs placés hors marché, hors concurrence, la santé, l’éducation, le logement en partie, l’accès à l’énergie. C’est une fiscalité juste, « que les gros paient gros et que les petits paient petits », qu’on cesse d’alléger les impôts pour les firmes, pour les grandes fortunes, tandis qu’on les alourdit, la TVA et impôts locaux, pour les modestes. Que l’Etat revienne aux manettes, et pas seulement pour distribuer des aides, des aumônes, des subventions, mais pour piloter les grandes transformations, l’impérative transition.
Voilà, en gros, qui ferait consensus.
Comme slogan, j’entends évoquer « la gauche du faire », et je suis pour. Je suis pour que nous recensions les bonnes initiatives des maires, que leurs expériences nourrissent notre imaginaire, que nous soyons attachés à changer un peu la vie des gens, au plus près, au plus concret. Mais si ce « faire » ne s’appuie pas, en parallèle, sur une « pensée » (sur la monnaie, sur le commerce, sur le marché, etc.), cette non-pensée, cette impensée, signifiera, en vérité, une acceptation de l’ordre économique établi. Et alors, cette « gauche du faire » ne fera pas grand-chose, elle n’ira pas loin, elle n’essaiera pas pour de bon.
Elle ira d’autant moins loin que jamais elle ne sera élue, qu’elle se hissera péniblement, au mieux, aux 5 % : les temps réclament de vrais changements.

Voilà sur le fond, et c’est, en gros, dans la continuité des positions de Jean-Luc Mélenchon.

Maintenant, il y a le ton.

A sa naissance, sortant du ventre de sa mère, un bébé pleure et crie : c’est signe de vitalité. Ce moment, nous l’avons franchi : à dix-sept députés insoumis, avec bruits et humeurs, nous avons existé.
Depuis, des choses se sont modifiées.

A gauche, le centre de gravité s’est clairement déplacé : à la présidentielle, Jean-Luc l’a largement emporté, à gauche, sur tous les autres candidats. Les Insoumis disposent, avec 75 parlementaires, au sein de la Nupes, du groupe le plus important. C’est autour de L’Avenir en commun, le programme insoumis, que s’est bâtie l’alliance des élections législatives. De quoi calmer, sinon éteindre, la « bataille pour le leadership ».

Surtout, une intuition : l’état d’esprit du pays. C’est bien sûr toujours de la psychologie au doigt mouillé, une question de pifomètre : mais les Français me semblent fatigués. Fatigués par les années Covid, guerre en Ukraine, inflation. Fatigués par les querelles, les polémiques à jets continus. Fatigués par l’indécence, par l’arrogance, par l’agitation du forcené de l’Elysée. Ils souhaitent de la paix, qu’on leur fiche la paix. Et le mouvement sur les retraites, si puissant, me paraît habité moins par un désir d’insurrection que de tranquillité, de sécurité, de protection. Il nous faut rassurer, je crois. Rassurer, face à un Macron qui inquiète. Rassurer sur l’ordre que nous allons ramener, dans la santé, dans l’éducation, dans les factures d’électricité, dans les porte-monnaie.

Rien ne sert de répéter « radicalité » à chaque phrase : soyons-le, avec sérénité, avec d’autant plus de force tranquille que nous avons pour nous l’évidence. Qui, aujourd’hui, veut plus de concurrence, de mondialisation, de compétitivité ? Plus personne. C’est fini. Leur monde est mort, même s’il court encore.

***

Jupiter, on a déjà donné.

Il n’y aura pas de Messie, pas de super-héros qui viendra, avec ses petits bras musclés et son magnifique cerveau, qui viendra relever la France. Il y faut une équipe, des forces organisées, et au-delà les milliers, les millions de bonnes volontés. Mais enfin, à ma place, voilà donc le chemin que je nous propose de tracer, sur le fond et dans le ton.

Est-ce le bon ?

Peut-on ainsi l’emporter, gagner une majorité de Français ?

Parviendra-t-on au bout de ce marathon ?

Y sont les bienvenus, en tout cas, tous les compagnons, la gauche dans toutes ses traditions.

Les Colonnes de la Création

Voici les Colonnes de la Création magnifiquement photographiées par le télescope spatial James-Webb récemment mis en orbite.

Les Colonnes de la Création sont un nuage de poussières et de gaz interstellaires situé à quelques 7000 années lumière de notre bonne vieille terre et d’une taille de l’ordre de 50 à 70 années lumière.

Il est difficile de se représenter de telles mesures; par exemple le soleil est situé à seulement 8,3 minutes-lumière soit tout de même quelques 150 million de kilomètres, ce qui reste pourtant peu de choses comparé aux distances évoquées ci-dessus.

En comparaison, avec ses 40 000 km de circonférence, notre terre n’est guère plus volumineuse qu’une crotte de mouche (excusez la comparaison..). Et pourtant, ils se trouvent sur terre des tas de cons pour revendiquer la propriété soit disant stratégique qui d’un ilot comme en Mer de Chine, qui d’un territoire comme à l’est de l’Ukraine, et j’en passe. Et on peut mesurer toute la dérision de nos revendications identitaires par rapport à des populations situées à des distances inexprimables à l’échelle cosmique.

Il serait donc probablement très profitable que chacun, et certains plus que d’autres, commence ses journées en se remémorant ces éléments cosmiques très élémentaires pour mieux relativiser nos préoccupations si terre à terre.

« La ballade de Mauthausen »

poème de Ιάκωβος Καμπανέλλης (Iákovos Kambanéllis)

musique de Μίκης Θεοδωράκης (Mikis Théodorakis)

Τι ωραία που είν’ η αγάπη μου με το καθημερνό της φόρεμα κι ένα χτενάκι στα μαλλιά.

Comme elle est belle ma bien aimée Dans sa robe de tous les jours Avec son peigne dans les cheveux.

Κανείς δεν ήξερε πως είναι τόσο ωραία

ersonne ne savait combien elle était belle.

Κοπέλες του Άουσβιτς, του Νταχάου κοπέλες, Mην είδατε την αγάπη μου;

Filles d’Auschwitz, Filles de Dachau, N’auriez-vous pas vu ma bien aimée ?

 Την είδαμε σε μακρινό ταξίδι, δεν είχε πιά το φόρεμά της ούτε χτενάκι στα μαλλιά.

Nous l’avons vue durant un long voyage Elle ne portait plus de robe ni de peigne dans les cheveux.

Τι ωραία που είν’ η αγάπη μου, η χαϊδεμένη από τη μάνα της και τ’ αδελφού της τα φιλιά. 

Comme elle est belle ma bien aimée, choyée par sa mère aimante et embrassée par son frère. 

Κανείς δεν ήξερε πως είναι τόσο ωραία

Personne ne savait combien elle était belle.

Την είδαμε στην παγερή πλατεία μ’ ένα αριθμό στο άσπρο της το χέρι, με κίτρινο άστρο στην καρδιά.

Filles de Mauthausen, Filles de Belsen, N’auriez-vous pas vu ma bien aimée ?

Τι ωραία που είν’ η αγάπη μου, η χαϊδεμένη από τη μάνα της και τ’ αδελφού της τα φιλιά

Nous l’avons vue glacée dans la cour avec un numéro sur son bras pâle une étoile jaune sur le cœur. 

Τι ωραία που είν’ η αγάπη μου, η χαϊδεμένη από τη μάνα της και τ’ αδελφού της τα φιλιά

Comme elle est belle ma bien aimée, choyée par sa mère aimante et embrassée par de son frère. 

Κανείς δεν ήξερε πως είναι τόσο ωραία

Personne ne savait combien elle était belle.

Un Papa ! Une Maman !

La très catho « Manif pour Tous » à saveur vichyssoise se tait et préfère regarder ailleurs.

Après celle des violences conjugales, la réalité cruement dévoilée par le rapport Sauvé a balayé les images d’Epinal d’une famille nucléique aux valeurs normatives, traditionalistes, moralistes, idéalistes, simplistes, virginales et mythiques ! même pas l’image d’un homme et d’une femme, sûrement trop sexuée, non juste celle d’un papa et d’une maman, et avec des auréoles sur la tête ! Très clean, très purs, très bons sentiments, comme un homme d’église quoi !

Nos sentiments, de l’altruisme à la cruauté, échappent à toutes normes et à toutes règles.

La seule réalité, c’est que chacun, face à lui-même d’abord, construit ou détruit sa liberté et sa vérité avec ses semblables. Ainsi le Bien et le Mal existent, mais nul ne sait où ni quand.

Les enfants se nourrissent affectivement de cette vérité et de cette liberté que leur apportent ou non les adultes en général et leurs parents en particulier .

Et là, peu importe s’il s’agit d’un homme, d’une femme, de deux femmes, de deux hommes ou d’un homme et une femme.



Salut Georges !

Imaginez donc, ici un gorille (et un juge), et là un marchand de paratonnerre (enfin, surtout son épouse), et puis ailleurs une escalope (oui, ça rime avec salope) et encore une cane (de Jeanne mais ça rime avec rien…) et aussi un Auvergnat généreux (si, si !), un chasseur de papillon à la jambe légère et à l’œil polisson avec Cendrillon filant sa quenouille et, fatalement, avec l’amour et son aiguillon (et des nuages porteurs de chagrin) , enfin de quoi nous faire tous monter au ciel et même au septième ciel !

Ah Georges ! tes chansons et tes musiques sont magiques et à force de les écouter, de les chanter en cœur avec les copains, et plus tard avec mes enfants, je les saurait toujours par cœur. Et la nique à l’Alzheimer !

Et puis, quand elle me mettra la main sur l’épaule et que du ciel et de la terre il me faudra faire mon deuil, je serai moins triste en sachant que là-haut je pourrai retrouver les copains d’abord puisque, coquin de sort, ton trou dans l’eau ne s’est toujours pas refermé !

Georges Brassens est né il y a 100 ans à Sète, le 22 octobre 1921. Et depuis le 29 octobre 1981, ce cher Georges propose aux baigneuses sa tombe en guise de paravent et même ne refuse pas qu’une ondine vienne de temps en temps gentiment y sommeiller avec moins que rien de costume…

Les copains d’abord.

« Tropique de la Violence »

Dans son roman publié en 2016, Nathacha Appanah nous amène dans une ile de la France d’Outre Mer, l’île de Mayotte, île de l’archipel des Comores perdue dans l’Océan Indien au large de Madagascar, une petite île avec son bidonville géant qui draine la misère avec la violence et la corruption dans des kwassas-kwassas venus depuis les îles voisines de l’archipel devenues indépendantes et abandonnées et qui sont depuis devenues un des états les plus pauvres du monde.

Avec Nathacha Appanah, la misère et le violence ne sont ni anonymes ni désincarnées. Dans son roman, Moïse et Bruce nous envahissent, nous y immergent , deux êtres si semblables « la même taille, la même forme du crâne, les mêmes lèvres charnues », et aussi la même couleur, les mêmes origines et enfin le même destin, finalement.

Moïse est apporté par la mer à bord d’un kwassas-kwassas; il est abandonné par sa mère parce qu’il aurait le mauvais œil, puis il est volé à son destin de clandestin par une muzungu, une « étrangère », Marie qui l’adopte illégalement. Il perd Marie trop tôt décédée et devient Mo la Cicatrice, enfant des rues, et retombe malgré lui dans sa destinée sous l’emprise de Bruce qui le soumet et l’écrase mais qu’à son tour il va réussir à dominer physiquement et qu’il va tuer pour s’en délivrer et peut être aussi pour le délivrer. Mo la Cicatrice redevient alors Moïse pour quelques heures seulement. Mais pour conserver sa liberté reconquise, il se jettera dans la mer par où il est arrivé et où il disparaît à jamais.

Bruce, son vrais nom c’est Ismaël Saïd. Son père voulait pour Ismaël un bel avenir: « mon père prie pour que j’aille loin que je traverse les mers que je porte un costume une cravate et que je parle bien français…. ». Mais ce n’était pas le destin d’Ismaël. A peine adolescent, parce qu’il ne réussit pas à être ce que son père voulait qu’il soit, il entre en conflit avec son père puis avec toute sa famille. Il devient rapidement Bruce, ado des rues, qui vit de rapines et de trafics. Dans cette jungle des rues, Bruce s’impose peu à peu, Bruce devient le « chef » de Gaza, quartier « défavorisé » de Kawesi. Enfermé dans son conflit avec son père, à la fois complice et piégé dans son rôle de chef de Gaza, Bruce est assoiffé de domination, il est violent,violeur, brutal et sadique.

« Gaza c’est un bidonville, c’est un ghetto, un dépotoir,un gouffre, une favela, c’est un immense camp de clandestins à ciel ouvert,… ». Gaza, c’est la putréfaction avancée de l’esclavage, puis du colonialisme, puis du néocolonialisme, en Afrique comme ailleurs. Gaza fabrique les Bruce.

Nathacha Appanah invite le lecteur à habiter ces personnages, à vivre tous les instants de leur vie, de leurs fuites, de leurs luttes, à penser comme eux, à ressentir leurs plaisirs et leurs souffrances.

Ce livre est donc paru en 2016. Aujourd’hui lorsque l’on consulte les actualités de l’île de Mayotte, on constate qu’il ne se passe pas de semaines sans agressions souvent mortelles. Les bidonvilles détruits ici réapparaissent là. Les kwassas-kwassas partent toujours des Comores voisines et s’ils ne disparaissent en mer apportent inlassablement de nouveaux migrants qui n’en finissent pas de tenter de fuir le dénuement et la misère.

Une bien belle histoire !…

C’est d’une belle BD dont il s’agit, dessinée et écrite par deux virtuose, Pascal Bresson et Syvain Dorange. Cette BD est publiée par les éditions « La Boîte à Bulles ». A acheter et à lire absolument !

Dans cette BD, il y a des animaux, des chiens et des chats et une famille sur laquelle pèse l’histoire.

Cette histoire débute le 30 septembre septembre 1943 à Nice où en pleine nuit la sinistre gestapo effectue une rafle de plus dans l’immeuble où habite la famille de Serge Karsfeld alors enfant. Son père se sacrifie et cache aux nazis la présence dans l’appartement de son épouse et des deux enfants. Son père périra en déportation.

Serge, sa sœur et sa mère cachés dans une armoire ne sont pas découverts et réussissent à échapper à la gestapo. Ils n’oublieront jamais ce jour.

Bien après Serge a grandi, mais n’oublie pas. Le 11 mai 1960, Serge et Beate se rencontrent. Beate est allemande et l’histoire de la famille de Serge et de son père la révolte, comme la révolte l’impunité de nombreux criminels nazis dans la République Fédérale Allemande. Serge et Beate vont s’unir. Ils vont faire de la dénonciation des criminels nazis le combat de leur vie.

Et ce combat débute e en plein congrès de la CDU par une gifle magistrale le 7 novembre 1968 assénée par Beate au chancelier Kiesenger, ancien nazi notoire.

Plus rien ne les arrêtera, ni les menaces, ni les insultes, ni les emprisonnements, ni même les attentats. Leur lutte pour la vérité historique et pour que justice soit rendue à tous les déportés juifs, résistants, tziganes, homosexuels ne cessera plus.

Après une traque de plus de 10 ans, le 5 février 1983, après une intervention du président François Mitterrand, Beate et Serge obtienne que le tortionnaire Klaus Barbie soit expulsé de Bolivie vers la Guyane Française où il est immédiatement arrêté, emprisonné puis rapatrié en France. Son procès en mai 1987 aboutira à sa condamnation à la réclusion à perpétuité. Il finira ses jours au fond d’une prison.

Le 8 octobre 1997 c’est le collabo Maurice Papon ancien haut fonctionnaire de Vichy dont ils obtiennent la condamnation à 10 ans de prison pour son rôle dans l’arrestation de nombreux juifs et communistes dans la région de Bordeaux.

Toute leur histoire se résume à cela: la vérité et la justice. Pour tous les déportés, pour les victimes de la Shoa, pour les enfants juifs déportés et assassinés.