La solitude est un pays qui brûle. Ses flammes vous ouvrent les yeux, avec une transparence qui fait miroiter les journées.
Le rire assouvit une soif qui n’a pas d’objet. En lui gicle un bonheur où le diable repose.
La politique mange les corps qui ont encore la faiblesse d’y croire.
Yannick Haenel – Les Renards pâles.
Catégorie : spectacles ciné expos bouquins etc…
Terraferma.
Lampedusa, c’est loin et si petit à l’échelle l’Europe et c’est presque en Afrique tellement c’est au sud.
Un navire sombre tout près de là quelque part en Méditerranée et des centaines de passagers s’y noient, cela fait ici si peu de bruit. Nous n’imaginons pas les souffrances endurées et la fin atroce de ces existences. Ils étaient des migrants venus d’Afrique ou d’Asie qui ne supportaient plus la misère et la guerre dans lesquelles ils étaient contraints de vivre. Ils sont partis, ils ont essayé de fuir vers une vie qu’ils imaginaient meilleure, vers cette Europe dont, sûrement, ils rêvaient. Leur rêve s’est terminé et a fait place au vide dans l’indifférence des puissants, si ceux ne sont les mots justes du Pape qui parle de « honte » et de « la mondialisation de l’indifférence ».
Terraferma est le titre d’un film italien d’Emanuelle Crialese tourné en 2011 et construit à partir d’un événement réel similaire où Timnit T, femme immigrée originaire de la corne de l’Afrique et actrice principale du film, a été une des seul survivants sur un groupe de 90 migrants qui essayaient eux aussi de rejoindre l’Europe, après avoir passé vingt-trois jours en mer sans manger ni boire. Ils ont vu des bateaux croiser leur embarcation sans qu’aucun ne fasse un geste pour leur venir en aide.
Aujourd’hui c’est la même histoire, aussi tragique, qui s’est répétée.
Ce film est intéressant parce qu’il montre bien la complexité des sentiments, les hésitations, les méfiances, les contradictions ressentis par les habitants de l’île de Lampedusa, confrontés à l’arrivée des migrants venus d’Afrique. C’est, en réduction, toutes les contradictions et tensions qui se développent en Europe où l’extrême droite voit ses idées progresser avec, entre autres, les Roms.
La peur conduit à la colère, la colère à la haine, et la haine conduit au côté obscur de la force.
Passion du regard.
Antonio Gamoneda.
Le soir entre soudain dans la cuisine, s’affole sur le cuivre, met en gloire la rouille des mères. Comme une toile il gagne les chambres, traverse, dore la face de l’homme, heurte les boiseries, franchit le laurier, tremble dans ses feuilles.
A présent, sur les chemins reviendront mules blanches et bœufs rouges et, fatigués, les hommes avec leurs cheveux plein de pailles
de blé.
Les ombres s’agrandissent au bord du mur de terre. Des langues d’acier plongent dans les eaux silencieuses.
Visite de la grande mosquée de Strasbourg
Les responsables de la mosquée nous (le PCCA) ont offert récemment la possibilité de venir faire des photos dans la mosquée, bien sûr en l’absence des fidèles. Nous avons été très bien accueillis et nous avons visité la salle des ablutions et la grande salle des prières.
Cette mosquée a été inaugurée en 2012; le principe de la construction avait été décidé 20 ans plus tôt et sa construction commencée en 2004 a donc duré plus environ 8 ans.
C’est un architecte italien de confession catholique, Paolo Portoghesi, qui a établi le projet de cette mosquée et qui a conduit sa construction. L’architecture choisie symbolise une fleur ouverte sur le monde sur la citée et répandant sa culture et sa croyance comme la fleur son parfum et sa beauté. Le travail des artisans marocains est particulièrement admirable.
Voici quelques photos réalisées lors de cette visite:
Il restera toujours des femmes…
La loi sur le mariage pour tous a été largement adoptée par l’assemblée nationale.
Mais la loi ne peut pas résoudre pas toutes les situations et, en effet, il restera toujours des femmes, pour regarder les hommes, pour les observer, pour essayer de percevoir derrière leurs carapaces la tendresse qui parfois les habite, pour essayer de percer les défauts qui se cachent parfois sous des dehors affables, et pour discerner dans l’entrelac de leurs talents et de leurs faiblesses si ils sont capables de tracer des chemins sur la mer, comme l’écrivait Antonio Machado. Une fois qu’elles les auront jaugés, les femmes décideront soit de les faire languir, soit de les séduire. Les hommes seront toujours, soit en grâce, soit en péril.
Mme Taubira est une femme de conviction, belle, digne et intelligente qui vient de porter haut les couleurs de progrès social et de république portées par la seule vrais gauche.
Et voici le poème d’Antonio Machado:
« Caminante, no hay camino… » (Antonio Machado)
Toi qui marches, il n’existe pas de chemin
Tout passe et tout reste,
mais le propre de l’homme est de passer,
passer en faisant des chemins,
des chemins sur la mer.
Je n’ai jamais cherché la gloire,
ni cherché à laisser dans la mémoire
des hommes ma chanson ;
j’aime les mondes subtils,
légers et aimables,
comme des bulles de savon.
J’aime les voir se peindre
de soleil et de rouge, voler
sous le ciel bleu, trembler
soudainement et se rompre…
Je n’ai jamais cherché la gloire.
Toi qui marches, ce sont tes traces
qui font le chemin, rien d’autre ;
toi qui marches, il n’existe pas de chemin,
le chemin se fait en marchant.
En marchant on fait le chemin
et lorsqu’on se retourne
on voit le sentier que jamais
on n’empruntera à nouveau.
Toi qui marches, il n’existe pas de chemin
si ce n’est le sillage dans la mer…
Il fut un temps dans ce lieu
où aujourd’hui les bois s’habillent d’épines
on entendit la voix d’un poète crier
« Toi qui marches, il n’existe pas de chemin,
le chemin se fait en marchant… »
Coup après coup, vers après vers…
Le poète mourut loin de chez lui.
Il est recouvert de la poussière d’un pays voisin.
En s’éloignant on le vit pleurer.
Toi qui marches, il n’existe pas de chemin,
le chemin se fait en marchant…
Coup après coup, vers après vers…
Quand le chardonneret ne peut chanter
Quand le poète est un pèlerin,
quand il ne sert à rien de prier.
« Toi qui marches, il n’existe pas de chemin,
le chemin se fait en marchant… »
Coup après coup, vers après vers.
Antonio Machado
Antonio Gamoneda….
J’ai fait presque toute les librairies de Strasbourg sans avoir pu trouver une seule des publications existantes de ce poète.
Etonnante absence (rejet ?) pour un poète célébré comme une des grandes voix de la poésie espagnole, peut-être à cause de sa poésie pleine de notre inexorable dégradation et de notre inépuisable souffrance. Mais cette poésie dépasse cette exploration désespérée sait offrir des instants sans limites
.
Heureusement la Médiathèque Municipale de Strasbourg permet d’accéder à toutes ses oeuvres.
Froid des Limites.
voici un poème qui peut être dédié à nos insomnies…
C’est bientôt l’aube. Il y a encore de la nuit sur tes plaies.
Voici venir les couteaux du jour. Ne
te mets pas nu dans la lumière, ferme les yeux.
Reste dans ton lit sanglant.
Cet autre poème me fait penser à une peinture: la madone d’Edouard Munch
Les serpents crient dans les cellules de l’air. L’ébriété monte des jambes féminines et toi tu poses tes lèvres sur leurs liquides.
Cueille la fleur de l’agonie. Elle est
encore humide la cendre que tu aimes.
___
Et voici toute la perfection et la pureté des mots simples …
Clarté sans repos
J’ai posé mes mains sur un visage et je les ai retirées blessées d’amour. A présent
l’oubli caresse mes mains.
Une passion froide durcit mes larmes.
Les pierres pèsent sur mes yeux : quelqu’un
me détruit ou m’aime.
Il existait tes mains…
Il s’agit d’un autre poème d’Antonio Gamonéda, plein de lumière…
Il existait tes mains – Antonio Gamoneda
Il existait tes mains.
Un jour le monde devint silencieux ;
les arbres, là-haut, étaient profonds et majestueux,
et nous sentions sous notre peau
le mouvement de la terre.
Tes mains furent douces dans les miennes
et j’ai senti en même temps la gravité et la lumière,
et que tu vivais dans mon cœur.
Tout était vérité sous les arbres,
tout était vérité. Je comprenais
toutes choses comme on comprend
un fruit avec la bouche, une lumière avec les yeux
Antonio Gamoneda.
Ma rencontre avec la poésie d’Antonio Gamoneda est fortuite et foudroyante. J’ai aimé tout de suite son acuité vertigineuse et sombre, sa survivance dans la recherche de la vérité et de l’absolu à travers le mensonge, dans cette promiscuité entre la lumière agonisante et acide et les ténébres de la perfection prétentieuse, dans la charnelle purulence de l’ardente et épaisse trahison, jaune, chaleureuse et réconfortante.
Sa poésie renferme la nausée et la violence de l’Espagne franquiste vécues dans la chair et le sang.
Il dit lui-même que son « profil d’écrivain va être déterminé par un ensemble de composantes historiques et biographiques : pauvreté familiale, rare fréquentation de l’école publique et contemplation innocente de la cruauté et de la misère morale de la guerre civile et de l’après-guerre militarisée
La lumière bout sous les paupières.
D’un rossignol abîmé dans la cendre, de ses noires entrailles, surgit une tempête. Les pleurs descendent dans les anciennes cavités jaunes, je discerne des fouets vivants
et le regard immobile des bêtes, leur aiguille froide dans mon coeur.
Tout est présage. La lumière est la moelle de l’ombre: des insectes vont mourir sur les bougies de l’aube. Ainsi
brûlent en moi les significations.
Il se peut que le silence dure au-delà de lui-même et que l’existence ne soit qu’un cri noir , un hurlement face à l’éternité.
L’erreur pèse sur nos paupières.
Le souffle de la poésie ondule dans la sérénité de nos anciennes douleurs.
1Q84.
Non il ne s’agit pas d’un code secret quelconque, c’est l’énigmatique titre du dernier roman en trois volumes du romancier japonais Harika Murakami.
Si un soir dans un ciel limpide, vous hésitez puis vous vous frottez bien les yeux et vous vous pincez cruellement, et malgré cela, mais oui, vous apercevez bien, à côté de notre bonne vieille lune, une nouvelle lune plus petite de teinte verdâtre, inquiétez vous.
C’est le signe que l’aiguillage a été activé
. Comme pour les personnages de ce roman, votre vie a basculé à votre insu dans l’univers 1Q84 sous l’influence funeste des forces mystérieuses des Little People. Mais il ne faut pas se laisser abuser par les apparences, il n’y a toujours qu’une réalité.
Les Little People sont des êtres invisibles. Nous ne savons pas s’ils sont bons ou mauvais, s’ils possèdent une substance ou non. Pourtant, constamment, ils creusent le sol sous nos pieds.
Les Little People de l’univers 1Q84 sont les héritiers de Big Brother, le leader éclairé et écrasant, mais aujourd’hui trop évident, du roman 1984 de Georges Orwell. Les Little People et l’étrange secte qu’ils inspirent (les Précurseurs) tissent et étendent laborieusement et méthodiquement leur toile invisible. Mais dans cet univers comme dans tout autre, le monde conserve un équilibre subtil et, plus leurs forces se lèvent, plus des forces qui leurs sont opposées apparaissent.
Comme Tengo et Aomamé, vous voilà projetés sans le savoir, au péril de votre vie et de celle de vos proches, dans un affrontement sans merci avec la secte des Précurseurs.
Aomamé, sa bouche fermée suggérait une personnalité qui s’adaptait difficilement. Ses lèvres étroitement closes ne laissaient jamais apparaître le moindre sourire et ses yeux étaient vigilants et froids. Qu’on la remarque et qu’on se souvienne d’elle le moins possible, voilà ce qu’elle avait toujours recherché étant enfant, et c’est ainsi qu’elle avait depuis toujours réussi à se protéger
‘.
Tengo était tout à la fois, peut être judoka de talent, peut-être grand romancier, peut être mathématicien de génie et toujours curieux. Mais il lui manque le désir, il ne voulait pas réussir coûte que coûte et il finissait toujours par être battu. Cela lui importait peu, il souhaitait simplement que les jours s’écoulent sans dérèglement, sans heurt ni incident
.
Tengo et Aomamé sont chacun à leur manière des êtres volontaires, honnêtes, purs et révoltés, solitaires et blessés, habités par le doute ou par la colère. Aveuglément, mus par leur destin et par le souvenir de leur fulgurante et fugitive rencontre étant enfants, ils se rapprochent lentement l’un de l’autre. Mais, pourtant, il est écrit que seul l’un d’eux pourra revenir de l’univers 1Q84 et échapper aux griffes des Little People et des Précurseurs.
photos du concert de solidarité avec l'association Solidarité Entr'aide Madagascar
Ce concert a été donné le 9 septembre dernier par l’Orchestre Métropolitain de Strasbourg (http://www.orchestre-m.com/) à l’Eglise Saint Paul de Strasbourg. Il a permis d’entendre des extrait de « la flute enchantée » de Mozart et de très belles voix de solistes également solidaires.
L’association SEM (http://semada.org/index.php/fr/) : « Créée en 1995 à Bollwiller en Alsace, Solidarité Entraide Madagascar (SEM) est une association à but non lucratif, indépendante de toute appartenance philosophique, politique ou religieuse, dont l’objet est de mettre en œuvre et de promouvoir des actions de développement rural à Madagascar. Centrée à sa création sur l’appui à l’éducation, elle a surtout développé depuis 2005 un important programme d’accès à I’eau potable et à l’assainissement sur la côte Est de la Grande Ile, mettant l’accent sur la formation et le renforcement des capacités locales. »
Sollicités par le chef d’orchestre Gabriel Mattéi qui dirige l’Orchestre M, nous sommes plusieurs photographes du PCCA (http://pcca.fr) à avoir réaliser des photos de ce concert et de la répétition générale qui l’a précédé.
Voici quelques unes des ces photos :